Comment améliorer la réponse européenne aux risques de blanchiment de capitaux et de financement du terrorisme ? (première partie)

Affaires - Pénal des affaires
24/01/2022
Coûts estimés de la corruption, conciliation de la protection des données personnelles avec la lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme (LCB-FT), moyens de la future autorité de supervision européenne, ont fait partie des débats abordés dès l’ouverture de la conférence ministérielle donnée le 21 janvier 2022 dans le contexte de la présidence française du Conseil de l’Union européenne (UE), qui a fait de la lutte contre la criminalité financière l’une de ses priorités.
Coûts annuels estimés de la corruption au sein de l’UE : au moins 179 milliards d’euros
 
À l’ouverture de la conférence « Protéger les européens contre la criminalité financière et le financement du terrorisme », la commissaire européenne chargée des affaires intérieures Ylva Johansson a d’emblée rappelé le coût annuel de la corruption au sein de l’UE, estimé à au moins 179 milliards d’euros. Parmi les armes de la lutte anticorruption : le Parquet européen, qui, depuis qu’il a commencé son travail en juin, a lancé « 500 enquêtes représentant 5 milliards d’euros de perte ».
 
Autre moyen de lutte contre la criminalité financière considéré par Ylva Johansson comme l’un des plus puissants - outre la législation européenne -  : les enquêtes financières. La commissaire européenne chargée des affaires intérieures a ainsi rappelé le rôle clé tenu par Europol à ce titre, dont elle a proposé de « renforcer le mandat en rendant possible de travailler directement avec des sociétés privées, les banques, dans le cadre d’enquêtes pénales ».
 
La confiscation des avoirs, fer de lance de la lutte anticorruption
 
Sur 139 milliards d’euros par an de profits criminels, seuls 1% sont confisqués par les autorités. Aussi Ylva Johansson prévoit-elle, dès juin, de proposer de nouvelles règles concernant le recouvrement des actifs, pour promouvoir le lancement systématique d’enquêtes financières et retirer l’argent des criminels afin de le rendre à la société.
 
La nouvelle autorité européenne aura-t-elle les moyens de ses ambitions ?
 
Les experts intervenant à cette conférence l’ont remarqué : l'AMLA, la future autorité de supervision européenne, a des objectifs ambitieux, d’où leur questionnement : les ressources qui lui seront allouées seront-elles suffisantes, ou devront-ils constater un décalage entre ses ambitions et ses moyens ? Pour la commissaire européenne aux services financiers, à la stabilité financière et à l’Union des marchés de capitaux, cette nouvelle autorité disposera de ressources qui seront « insignifiantes comparées au coût de ne pas avoir un paquet législatif antiblanchiment qui fonctionne efficacement » ; si elle fera en sorte que les moyens soient suffisants, elle a précisé que la valeur ajoutée de cette surveillance à l’échelle européenne compensera largement les ressources, et insisté sur l’importance de la volonté politique.
 
Quelle protection des données personnelles ?
 
Enfin, ces objectifs ambitieux peuvent-ils être conciliés avec la protection des données personnelles, et notamment concernant la conservation des données par Europol ?
Pour trouver ce juste équilibre, Yvla Johansson a indiqué que le directeur d’Europol avait consulté le superviseur européen de la protection des données afin de s’assurer de travailler en conformité avec les exigences de protection de la vie privée. D’ici un mois, une nouvelle règlementation en la matière devrait aboutir, a assuré la commissaire européenne chargée des affaires intérieures.

Pour aller plus loin, voir le Lamy Droit pénal des affaires, n° 1797 et s. ainsi que le n° 6546 et s.
Source : Actualités du droit